Episode 2 | Les Lebaudy à la conquête de l'air
20 ans d’enrichissement des collections
L’occasion des 20 ans du bâtiment des Archives départementales, construit en ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines, est un moment privilégié pour présenter une sélection des documents les plus notables venus intégrer par "voie extraordinaire" nos collections depuis 2004. La "voie extraordinaire" est celle empruntée par les archives non produites par l’administration et autrefois détenues par des particuliers, des associations ou des entreprises. Simples pièces ou ensembles conséquents, leur analyse renouvelle notre connaissance du territoire, de ses habitants et des évènements qui s’y sont déroulés. Ainsi, nous vous invitons périodiquement à découvrir ces sources de l'Histoire, autant de trésors relatifs à une personne, un lieu ou un évènement !
Episode 2 | Les Lebaudy à la conquête de l'air
Plaques de verre des aérostats conçus dans les ateliers de Moisson
L'ascension des Lebaudy
Le nom des Lebaudy est étroitement lié au Mantois, situé dans la vallée de la Seine entre leur Normandie ancestrale et la capitale où a débuté leur ascension sociale. Leur succès dans les affaires et sur la scène politique ne saurait occulter la passion de trois générations pour l'aéronautique, comme en témoignent les plaques de verre présentant les différents aérostats construits dans leurs ateliers de Moisson, désormais intégrées aux collections des Archives départementales des Yvelines.
Leur ascension sociale a commencé durant la première révolution industrielle, marquée notamment par l'apparition de la machine à vapeur, le développement de la sidérurgie et du chemin de fer. Originaire du Calvados, Jean Lebaudy s'installe à Paris après la Révolution. En 1824, il fonde sa première raffinerie à La Villette et y investit toutes ses économies, soit 700 000 francs-or. L’entreprise prend de l'ampleur avec l'aide de ses trois fils. L'un d'entre eux, Guillaume, hérite de l’entreprise à sa mort et la lègue à ses deux enfants, Gustave (ou Jean-Gustave) et Jules. L'affaire familiale prend alors le nom de "Lebaudy frères". Leurs enfants respectifs leur succèdent, mais seuls Paul, Pierre et leur cousin Robert s'occupent de l’usine, tandis que les autres en perçoivent les dividendes. En 1889, Paul prend la direction, toujours en étroite collaboration avec son frère.
Une influente famille républicaine
en territoire mantois
Les Lebaudy appartiennent à ces puissantes familles du XIXe siècle résidant à l'ouest de Paris, à l'instar des Gévelot à Conflans-Sainte-Honorine. Ces capitaines d'industrie, installés dans d'anciens châteaux aristocratiques et nouant des alliances avec l'ancienne noblesse, s'opposent néanmoins aux idées de restauration de l'ordre monarchique et soutiennent activement l'instauration de la IIIe République.
L'empire industriel des Lebaudy les hisse parmi les plus grandes fortunes de France à la Belle Époque. Jean-Gustave Lebaudy (1827-1889) incarne le mieux cette réussite dans les affaires et la politique. Il siège à la chambre de commerce de Paris et, sous le Second Empire, à la commission municipale de Paris (1860-1869) en tant que représentant du 19e arrondissement. Conseiller général de Seine-et-Oise pour le canton de Mantes-la-Jolie, ami de Léon Gambetta, il est élu député dans son arrondissement en 1876 sous l'étiquette de républicain conservateur. Siégeant au centre gauche au Parlement, il s'oppose aux tentatives de restauration monarchique voulues par le président Mac Mahon en signant le fameux manifeste des 363. Réélu en 1877 et en 1881, il fait partie de la fraction la plus modérée de la majorité républicaine. Battu en 1885, il est réélu en 1889. Pour soutenir ses idées politiques, il crée le journal Le Petit Mantais, dont le premier numéro paraît le 6 octobre 1880.
Paul Lebaudy (1858-1937) suit les traces de son père. Il entre dans la vie politique en 1884 en devenant conseiller général du canton de Bonnières-sur-Seine, poste qu'il occupe jusqu'en 1928. Il succède à Gustave comme député de l’arrondissement de Mantes-la-Jolie et exerce ce mandat pendant cinq législatures, de 1890 à 1910.
De nouveaux bienfaiteurs au château de Rosny
En 1869, Gustave acquiert le château de Rosny en bord de Seine et entreprend sa restauration complète, lui rendant son ancienne splendeur en rachetant meubles, tableaux, tapisseries et objets d’art ayant appartenu à deux de ses propriétaires les plus illustres, les Sully et la duchesse de Berry. En 1895, son fils Paul hérite du château paternel et fait aménager les communs pour abriter ses écuries et à la belle saison, la meute de chiens qui fait la renommée de son équipage. À la fin du XIXe siècle, il fait recréer des jardins à la française sur le parterre Nord par le célèbre paysagiste Achille Duchêne. Après sa mort en 1937, le château passe à sa seconde épouse Clotilde, fille du comte Murat, et est classé Monument historique en 1941. En 1949, son fils Jean Lebaudy en hérite puis le vend en 1955, y laissant "à perpétuelle demeure" l’ensemble des biens mobiliers historiques que sa famille y avait rassemblés.
Les actions généreuses des châtelains de Rosny profitent aux habitants du Mantois. Paul Lebaudy finance l'hospice de Mantes pour les indigents, ainsi que la construction des orphelinats de Fontenay-Saint-Père et de Villers-en-Arthies. Poursuivant l'œuvre de la duchesse de Berry, la famille achète et soutient l'hospice Saint-Charles, jouxtant le domaine de Rosny, en contribuant à son fonctionnement et à son développement. Il devient un hôpital auxiliaire durant la Première Guerre mondiale.
Les villes de Rosny et de Moissons ont entamé leur modernisation sous l'impulsion de leurs bienfaiteurs. Ils favorisent la construction de bâtiments publics comme l'école et la poste de Rosny et aident les associations locales. La veuve de Gustave Lebaudy participe à la construction de la nouvelle église de Rosny et du presbytère de Moisson. Surnommée « La Bonne Dame », elle permet la mise au jour, lors de fouilles sous l’ancienne église, de l’existence à Rosny d’un cimetière romain et mérovingien. Enfin, lors des spectaculaires inondations de 1910, des repas chauds sont distribués aux victimes devant la grille du château. Les derniers propriétaires du domaine, Jean et sa femme, font don en 1962 et 1972 à la ville de Versailles de leur collection de manuscrits, gravures et livres anciens de provenance rare, qui ornaient la bibliothèque du château.
Les aérostats, une passion Lebaudy
Un ballon dirigeable est un aéronef qui utilise un gaz porteur pour assurer la majeure partie de sa sustentation, tandis que des systèmes de propulsion lui permettent de se déplacer de manière tridimensionnelle et manœuvrable. La conquête de l'air par les premiers dirigeables trouve un cadre privilégié dans l'ouest parisien. Le 24 septembre 1852, Pierre Giffard réalise le premier vol de dirigeable entre l'hippodrome de Paris et Élancourt. Les inventeurs qui se succèdent au XIXe siècle apportent des améliorations significatives à partir des années 1870 en rigidifiant la structure et en facilitant sa manœuvrabilité à l'aide d'un moteur léger permettant la rotation d'une hélice. En 1884-1885, le colonel Charles Renard réalise le premier ballon réellement dirigeable, le ballon La France qui réussit à faire plusieurs sorties autour de la base de Chalais-Meudon. La faible autonomie de son moteur électrique limite son rayon d'action. Ce n'est qu'avec l'apparition du moteur à explosion que les voyages aéronautiques semblent possible.
En 1899, Paul et Pierre Lebaudy aidé de leur cousin décident d'investir pour prendre part à cette conquête de l'air. Les frères confient à Henri Julliot, alors ingénieur à la direction technique de leur raffinerie, d'étudier la question aéronautique en mettant à sa disposition les moyens nécessaires pour réaliser ses projets. Un atelier est établi sur un vaste terrain à Moisson. Ce site offre divers avantages : il est situé en bordure de Seine, facilitant le transport de marchandises volumineuses, il n'est qu'à une dizaine de kilomètres de la station ferroviaire de Bonnières, enfin, Moisson est à l'abri des regards indiscrets.
Pour accueillir les aéronefs, un premier hangar à dirigeables est commandé à Leduc, entrepreneur à Rosny en 1902, puis un second bien plus grand à l’architecte Sainte-Beuve, en 1909 . Les hangars de Moisson impressionnent par leur dimension colossale. En 1904, seuls 3 hangars de cette taille existent en France : à Moisson chez Lebaudy, à Sartrouville chez Astra et à Chalais-Meudon.
L’installation aéronautique créée par MM Lebaudy, dans un enclos fermé, empêchant d’approcher trop près du ballon, comprend en outre un hangar : une usine produisant l’électricité pour les divers usages (force motrice, éclairage) ; une usine pour la fabrication de l’hydrogène ; des ateliers aérostatiques pour la fabrication des ballons pilotes et des ballons gazomètres, en même temps que pour effectuer les divers travaux que nécessite le grand dirigeable, un bureau technique ; un logement pour le gardien et , enfin, un pigeonnier qui permettra d’emporter de rapides messagers dans la nacelle, lorsque le ballon devra effectuer de longs parcours et perdre de vue son port d’attache.
Le hangar qui constitue la partie principale de cet établissement mesure 60 mètres sur 12 mètres, il a 15 mètres de hauteur. […] L’axe du hangar est exactement orienté sur Paris. Le petit côté qui regarde la capitale sert à la sortie du ballon, et n’est fermé que par une énorme porte à deux vantaux à glissière, se déplaçant dans un vaste cadre en charpente.Lieut.-Colonel G. Espitallier, Revue "Le Génie Civil, Revue Générale hebdomadaire des industries françaises et étrangères", 13 juin 1903.
Le parc aérostatique transforme la vie du village de Moisson. Une soixantaine de femmes et une trentaine d'hommes travaillaient dans les ateliers Lebaudy. Les femmes accomplissaient le travail de collage et de couture des toiles servant au revêtement, tandis que les hommes s'occupaient du montage de l'armature du ballon et de la nacelle. L'ingénieur Henri Julliot, âgé de 50 ans au début de l'aventure assurait la coordination des équipes aidé d'Antoine Rey, mécanicien attitré, Gaston Surcouf, cordier et Georges Juchmès, pilote. Il s'agissait d'ateliers d'assemblage : l'armature métallique des aéronefs était fabriquée dans les usines Lebaudy de la Villette tandis que la confection des hélices en bois de noyer était confiée à la société Chauvierre.
Une épopée en image
En avril 2012, 167 plaques de verre présentant plusieurs aérostats construits dans les ateliers de Moisson sont acquis par les Archives départementales des Yvelines. L'auteur de ses clichés (dont on perçoit l'ombre au sol sur certains clichés) appartient au cercle d'Henri Julliot et Georges Juchmès. Le photographe accède à l'intérieur des hangars interdits au public, monte dans les nacelles, observe les premiers essais et assiste aux principales manifestations. Ces clichés couvrent la période de 1904 avec le premier envol du Lebaudy I, à 1915 avec la sortie du Tissandier des ateliers de l'Armée. Son appareil photo ne pénètre néanmoins dans les ateliers de Moisson qu'à partir de 1908.
Les aéronefs semi-rigides estampillés Lebaudy frères
L'aéronef Lebaudy appelé Le Jaune est un dirigeables à ballon semi-rigide : l'armature métallique se trouve entre la longue enveloppe et la petite nacelle. Pour ignifuger la toile, ils étaient badigeonnés au chromate neutre de plomb, ce qui leur donnaient une couleur jaune, d’où leurs surnoms. L'enveloppe, en forme de cigare effilé aux deux bouts, est gonflée avec de l’hydrogène.
17 dirigeables Lebaudy / Julliot sortiront des ateliers d'octobre 1902 à mai 1915.
Le succès des premiers vols des dirigeables Lebaudy
Les 4 premiers ballons de Lebaudy n’ont pas eu de nom officiel. On les trouve sous le nom de Le Jaune ou Lebaudy, ce qui créé une confusion d’identification. Plus tard, le Ministre de la Défense fait adopter officiellement le nom de Lebaudy I à IV aux quatre premiers ballons.
Les premiers essais d'un ballon Lebaudy (I) débutent en avril 1902. Le 25 octobre, il sort pour la première fois de son hangar et les équipes techniques tentent de premières manœuvres en retenant captif le ballon.
[Début novembre 1902,] après l'exécution méthodique d'un programme d'expériences préliminaires arrêtées par M. Surcouf et acceptées par MM. Paul et Pierre Lebaudy, recherches portant sur la solidité de la suspension, sur la perméabilité de l'enveloppe sous pression, la possibilité d'inflammation du gaz, le réglage du mécanisme, la mesure de la puissance du moteur et du rendement des hélices, on décidait de profiter du calme de l'atmosphère pour remplir le septième paragraphe du tableau des expériences : Excursions aériennes.
Georges Besançon, L'Aérophile, Paris, 1902, p. 272
Le 12 novembre 1902, l'aérostat s'élève sans attache terrestre. Avec à son bord, MM. Surcouf, commandant de bord, Julliot et le mécanicien Eberlé, Le Jaune réalise un voyage maitrisée au-dessus du village de Moisson. 20 kilomètres sont parcourus en quatre essais ce jour-là ; la vitesse propre du ballon est estimée à environ 10 à 11 mètres par seconde. Le lendemain, l'expérience est renouvelé en présence de Paul Lebaudy, de diverses personnalités locales, de journalistes et d'une foule de curieux. Les aéronautes organisent un véritable voyage le 8 mais de 37 km qui les amènent à survoler Mantes-la-Jolie, et le château de Rosny avant de revenir à Moisson. Jamais un dirigeable n'avait obtenu de résultats aussi remarquables.
Pour marquer les esprits, les frères Lebaudy organisent un voyage historique vers Paris, un an après le premier vol : le 12 novembre 1903, le dirigeable, piloté par Georges Juchmès, part vers la capitale. Il remonte la Seine, passe par Poissy, Chatou, Nanterre, Saint-Cloud, contourne la Tour Eiffel et atterrit sur le Champ-de-Mars. La foule afflue en masse, si bien que les frères Lebaudy choisissent de le laisser à Paris pendant quelques jours, à l'abri dans la Galerie des Machines de l'Exposition universelle de 1889. L'aérostat quitte Paris le 20 novembre en direction de Chalais-Meudon, mais à son arrivée au parc, le vent le projette contre un bouquet d'arbres, déchirant son enveloppe.
Cela ne décourage pas les frères Lebaudy qui reconstruiront successivement trois autres dirigeables de forme similaire, tout en introduisant à chaque fois des améliorations. Lors du vol du Lebaudy II, le 20 août 1904, Mme Paul Lebaudy fait parti de l'équipage. Elle entre ainsi dans l'histoire en devenant la première femme au monde à voler dans un dirigeable. Enfin, le dernier modèle, Lebaudy IV sera cédé à l'Armée et accueilli à Chalais-Meudon en 1908.
Des dirigeables militaires
À la fin de l'année 1905, après les essais du dirigeable Lebaudy III à Toul, l'armée, séduite par les résultats, commande des dirigeables similaires mais plus puissants pour un usage militaire. La construction de la structure est confiée aux frères Lebaudy à Moisson, sous la supervision de Georges Juchmès. Seront ainsi fabriqués La Patrie en 1906 et La République en 1908, deux aéronefs propulsés par des moteurs Panhard-Levassor de 70 chevaux, issus de la voiture de course qui a remporté le Paris-Vienne. Le site de Moisson est alors entouré de grillages et placé sous la surveillance de 40 militaires, un nombre qui passera rapidement à 80. Le gardiennage est d’autant plus justifié que les Allemands, tentent par tous les moyens de percer le mystère Julliot : tentative d’achat d’un dirigeable, espionnage par les airs ou encore à l’usine…
La Patrie est considéré comme le premier dirigeable militaire de l’armée française, et du monde. Cependant, La République gagne une popularité encore plus grande. Le 14 juillet 1909, il prend part aux festivités en survolant les troupes lors du défilé à Longchamp, à Paris. Le 4 août 1909, sous le commandement du capitaine Bois et piloté par le commandant Fleuri, le dirigeable remporte le prix Deutsch de la Meurthe (10 000 francs), décerné au premier appareil aérien motorisé capable de réaliser un circuit de 200 km autour de Paris.
La fin tragique du dirigeable La République
Le 25 septembre 1909, le dirigeable La République décolle de Lapalisse dans l'Allier, survolant Moulins avant de s'écraser à Trévol. L'accident est provoqué par la rupture d'une pale de l'hélice, qui déchire l'enveloppe, alors que l'appareil devait participer au premier Salon de l’Aéronautique en survolant le Grand Palais de Paris, où l'événement était inauguré le même jour. Cet accident tragique cause la mort de l'équipage : le capitaine Marchal, le lieutenant Chauré, ainsi que les adjudants Vincenot et Albert Réau. L'accident créait une vive émotion dans l'opinion public et les rangs de l'Armée. Des funérailles nationales sont célébrées en l'honneur des victimes le 28 septembre 1909 à la cathédrale Saint-Louis de Versailles. Le cortège dans lequel se pressent ministres, cadres de l'armée et officiels étrangers, doit se frayer un chemin dans des rues noires de monde, ce qui ne manquera pas d'inquiéter les autorités. Il faudra affréter plusieurs corbillards spécialement pour acheminer les plus de 200 couronnes de fleurs remises par chaque délégation.
Georges Juchmès assiste aux obsèques, en présence de l'équipage du Liberté, un nouvel aérostat plus long que les précédents, essayé durant l'été 1909. Les frères Lebaudy l'offriront à l'Armée pour soutenir la création d'une flotte d'aérostats militaires fragilisée depuis la perte du République. La fin tragique de ce dernier n'entache pas la réputation des ateliers Lebaudy qui réalisent en 1911, pour le compte de la défense nationale, des dirigeables toujours plus grands, plus rapides et d'une grande capacité comme Le Capitaine Marchal et Le Lieutenant-Selle-de-Beauchamp. Depuis l'accident de 1909, les nouveaux aérostats militaires portent le nom de victimes d'accidents aériens, une tradition déjà en place dans la Marine.
Commandes pour l'étranger
En parallèle des commandes passées par l'Etat français, les frères Lebaudy développent leur clientèle à l'internationale, travaillant aussi bien pour des sociétés que des États, alliés de la France. Ils font réaliser des dirigeables : le Lebed pour la Russie en 1909 et le M II pour l'Autriche en 1910 qui ne sera jamais livré ; le dirigeable Morning-Post, commandé en juillet 1909 par le journal britannique grâce à une souscription auprès de ses lecteurs, inaugure un nouveau modèle d'appareil. Sa rapidité repose sur un double moteurs Panhard & Levassor de 70 chevaux de troisième génération. Pour sa livraison, le ballon traverse la Manche le 26 octobre 1910 pour gagner Adelshot en Angleterre. Hélas, après plusieurs sorties réussies, le dirigeable est détruit dans un crash provoqué par son pilote, Louis Capazza et à une erreur des équipiers au sol qui ont laissé échapper les cordes de guidage.
Le dernier vaisseau
Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, l'Armée française demande à quatre ateliers la conception de dirigeables pouvant transporter des charges lourdes afin d'effectuer des missions de bombardement et concurrencer les zepplins allemands. Un géant des airs est alors construit par l'ingénieur Henri Julliot. Le croiseur aérien Tissandier effectue sa première sortie à Toul le 12 octobre 1914. Ce dirigeable dispose de 3 nacelles avec 3 hélices dans chaque nacelle, 2 hélices latérales, 1 propulsive, hélices à 4 pales. L'expérience est finalement abandonnée.
Le déclin des usines aérostatiques Lebaudy
Plusieurs facteurs amorcent le déclin des aéronefs Lebaudy : l'arrivée de la guerre, des problèmes techniques et financiers, ainsi que les progrès rapides de l'aviation. L'activité des ateliers s'arrête en 1914. Agé de 60 ans, Henri Julliot s’exile aux États-Unis en 1915, Georges Juchmès mobilisé durant la guerre est affecté dans le bataillon d’aérostiers de Chalais-Meudon.
L'histoire des dirigeables Lebaudy s'inscrit comme une parenthèse de 15 années dans la vie d'un village et d'une famille. Moisson aura été le théâtre d'un moment important de la conquête de l'air, sans que l'activité soit maintenu sur place alors que l'industrie aéronautique connaît une expansion sans précédent après la guerre. Jusque dans les années 1950, les historiens estimeront longtemps le financement et l'intérêt de la famille Lebaudy pour les aérostats comme une activité philanthropique et secondaire. Les biographies sur Paul Lebaudy préfèreront souligner ses engagements politiques et la prospérité de l'industrie sucrière qu'il dirigea.
Tableau récapitulatif des dirigeables Lebaudy
Nom des dirigeables | Volume et vitesse | Date de mises en service | Date de fin de service |
---|---|---|---|
Lebaudy 1 | 2 285 m3, 28 nœuds | 13 novembre 1902 | 22 novembre 1903 |
Lebaudy 2 | 2 285 m3, 28 nœuds | 4 août 1904 | 22 décembre 1904 |
Lebaudy 3 | 2 950 m3, 18 nœuds | 4 juin 1905 | |
Lebaudy 4 | 3 300 m3, 25 nœuds | 2 octobre 1905 | |
La Patrie 1 | 3 250 m3, 30 nœuds | 16 novembre 1906 | |
La Patrie 2 | 3 250 m3, 30 nœuds | 21 octobre 1907 | 1er décembre 1907 |
La République | 3 700 m3, 30 nœuds | 24 juin 1908 | 25 septembre 1909 |
La Russie, puis Lebed (commande pour la Russie) | 3 300 m3, 25 nœuds | 29 mai 1909 (Moisson). 7 septembre 1909 (Russie) |
|
La Liberté | 4 200 m3, 33 nœuds | 27 août 1909 | |
M II (commande pour l'Autriche) | 30 mai 1910 | ||
Morning Post (commande pour l'Angleterre) | 10 000 m3, 33 nœuds | 26 octobre 1910 | 4 mai 1911 |
Général Meusnier | Non construit | ||
Capitaine Marchal | 7 200 m3, 32 nœuds | 24 mars 1911 | |
Lieutenant-Selle-de-Beauchamps | 10 000 m3, 33 nœuds | 29 octobre 1911 | |
? 10000 mètres cubes | Non achevé | ||
? 11000 mètres cubes | Non achevé | ||
Tissandier I et II | 12 octobre 1914 | Mai 1915 |
Documents présentés
Aéronefs Lebaudy - Hangars de Moisson, usine à gaz hydrogène, transport, ballons dirigeables (1902-1915) : 167 plaques de verre
Référence : 5Fi414 1 à 167
Modalité d’entrée : achat du 24 avril 2012
Articles conseillés pour compléter cet article
- Le Petit Mantais du 5 novembre 1902
article sur les premiers vols du Lebaudy I - Le Petit Mantais du 17 mai 1903
article sur l'incident de Sandrancourt le 15 mai 1903, durant lequel la population de Moisson est de ses alentours est venue aider pour rappatrier le dirigeable Lebaudy à rentrer sur la base. - Le Semeur de Versailles du 30 septembre 1909
article sur les funérailles des victimes ddu dirigeable La République organisées à Versailles le 25 septembre 1909. - Recensement de la Population de Moisson en 1906
liste des habitants de Moisson indiquant leur implication dans l'activité de la base aérostatique des Lebaudy.
Archives dép. Yvelines : 9M716 1
Principales sources conservées aux Archives départementales des Yvelines sur l'aéronautique
- IN-4° 115 – Jean-Luc Leleux, Dalila Hachelaf, Moisson : La Presqu’île des dirigeables, PAirs, Editions Pierann, mai 2001
- Sous-série 5Fi
- 5Fi 351 - Aérodrome de Buc - Le 18 juin - Robert Esnault-Pelterie sur son R.E.P. n°2 s'élève dans un vol de 1 200 mètres environ, à une quarantaine de mètres de hauteur. 3 tirages argentiques d'époque.
- 5Fi 363 à 370 - Photographies concernant l'aéronautique pendant la période 1930-1939 : pionniers et grands pilotes (1930-1939).
- 5Fi 410 1 à 16 - L'exploitation de l'aérodrome de Buc, aussi appelé aérodrome de Toussus-le-Noble, débute en 1907 lorsque les frères Farman et Robert Esnault-Pelterie louent un terrain situé sur les communes de Buc et Toussus-le-Noble. Au début, seul un hangar est construit près de l'étang du Trou-Salé. En 1909, Louis Blériot installe un aérodrome privé appelé l'aéroparc de Buc qui sert de centre d'essai. Également, les premières écoles de pilotage sont créées. Le 28 mai 1911, la course Paris-Nice-Rome-Turin effectue son départ depuis l'aérodrome de Buc.
- 5Fi 515 à 526 - Louis Bréguet : photographies (1900-1915)
- 5Fi 527 à 553 - Robert Esnault-Pelterie (REP) : photographies [1900-1930].
- Série J continue
- J 3745 - Aviation - Dossier d'installation de chauffage d'un hangar d'aviation situé à Villacoublay, 1921.
Dossier établis pour les frères Milinaire 23 rue Lafontaine à Saint-Ouen, -par la société Olivet et Mazars, ingénieurs constructeurs (108 rue Damremon à Paris), spécialisé dans le chauffage central, les ventilateurs séchoirs : correspondance, devis, publicité et plan d'ensemble du hangar et vue de détail de la fosse puis par les établissements Pommier-Delaporte, 15-17 rue Salneuve à Paris 17e : correspondance, devis, publicité et plan du hangar ; - devis pour la fabrication de stores à fournir pour un hangar d'aviation par la société Perrin, 40 avenue de la Grande Armée Paris (en-tête commercial avec échantillon de tissu) - J 3861 - Ensemble de documents surtout figurés (dont cartes postales) et écrits concernant Louis Blériot (XXe siècle)
- J 3950 - Clément Ader, avion Eole : photographie, carte de visite, bulletin. (1890-1898). Photographie de l'avion n°3 de Clément Ader, ailes repliées (reproduction du Musée de l'Air et de l'Espace) ; Carte de visite de Claude Bajard, modeleur-mécanicien Hélice Eole" ; Description des machines et procédés pour lesquels des brevets d'invention ont été pris, tome LXXVI, année 1890 ; Plan de l'Eole, 19 avril 1890 (reproduction d'un blue print) ; Communication et étude de la communication de Clément Ader à l'Académie des Sciences, 31 mai 1898.
- J 3951 - Louis Bréguet et Charles Richet : Lettre de Charles Richet à M. Tissandier à l'Aéroclub de Paris, 1928 ; Lettre de Charles Richet ; Pages 527 et 528 de L'aviation triomphante.
- J 3952 1 à 6 - Ecole Bréguet, 81 à 89 rue Falguière à Paris : cartes postales. (1904-1910)
- Voir aussi
- Musée de la Ballonnière et de la Jamborée de 1947
- Musée de l’Air et de l’Espace Français
- Service Historique de la Défense